Vendredi 02 décembre 2022. C’est dès l’aube, très tôt le matin, aux températures encore fraîches, que nous nous envolons ma fille et moi. Des températures hivernales qui s’annoncent : il faut être bien équipé pour faire face au froid scandinave et affronter les -5 degrés.
Il suffira de visionner une émission sur les aurores boréales et forêts de sapins enneigés avant que notre souhait nous mène vers l’aventure qui en nait.
Nous décollons à 7h:00, à bord d’un A321, à la découverte de ce qui nous restait inconnu. Nous nous envolions vers la connaissance d’une Terre qui nous était étrangère.
La veille encore, Youssra, Farida et moi tenions la discussion dument philosophique et spirituelle : quel sens donne-t-on à notre quotidien ? Est-ce en adéquation avec ses valeurs religieuses, spirituelles et humaines ? Et si nous étions en contradiction, comment y remédier ?
Complexe et épineux comme sujet, c’est certain, et comme chacune de nos pensées, elle se termine par une demande auprès du Créateur : la meilleure des guidances et demeurer utile à tous les vivants de ce monde et de l’autre.
L’humain tient un rapport de spiritualité avec la nature et l’univers dans son immensité.
Notre sensibilité se développe à la rencontre des montagnes enneigées, de la mer bleue, des champs de blés dorés, des étoiles lumineuses, des fleurs colorées, des vivants la peuplant : tout ce monde ne peut être indifférent. Nous, êtres humains, sommes parties intégrantes du vivant de cet univers. Ensemble, nous vivons, cohabitons, rions, parlons et dès lors, le langage du cœur prend sa place.
Je suis accompagnée d’un livre écrit par Anne lyse Chabert, une philosophe atteinte d’une maladie rare, qui m’accompagnera lors de cette quête. Une auteure dont la maladie est un handicap, la plupart de ses membres inopérants, pourtant, c’est avec grande humilité et sagesse qu’elle racontera sa vie dans Vivre son destin vivre sa pensée.
Elle introduit son écrit en reprenant les dires de Spinoza, évoquant qu’un aveugle est jugé du fait que la vue lui soit privée puisque nous le comparons aux autres ou à celui qu’il était, fut un temps.
Le commandant de bord fait l’annonce et, de notre hublot, s’apparentait déjà le paysage prêt à nous accueillir. Et puis voilà, nous atterrissons enfin.
Stockholm nous accueille dans sa plus grande nature : froide comme cela nous a été promis. Il est temps de découvrir, direction le train express vers Central N, gare centrale. De là, la ligne de métro 18 pour nous conduire vers Friedemsplan, pas loin de l’hôtel qui nous ouvrait ses portes.
Musées, parcs, château, marche, gratte ciels, souvenirs, cadeaux, trois jours introductifs afin de nous familiariser avec l’environnement qui nous recevait.
Mais là encore, notre souhait ne fut point conquis : c’est plus loin que nous devons explorer. Pays des rennes et des aurores boréales, transporte nous vers la conquête du Nord, La Laponie où comme la nomment ses habitants Sápmi, dû aux « samis », premiers habitants du nord de la Scandinavie, qui la faisait vibrer.
Mardi 6 décembre, 5 heures du matin : nous voilà déjà en chemin pour ce qui sera l’une des expériences les plus riches de nos vies.
Un voyage en train d’une durée de 14 heures – ne dit-on pas que les choses les plus belles sont celles dont la durée d’attente est plus longue ? – . Plusieurs étapes attendaient notre train pour une arrivée prévue à 20h20 à Kiruna.
Fraîcheur d’extérieur, intense chaleur d’intérieur, la simple fenêtre qui nous sépare du monde enneigé nous préserve des températures lourdes. Le soleil ne caressera pas nos visages aujourd’hui : à l’heure où nous montons, il fait nuit, et quand nous descendrons, il fera encore nuit, la journée se veut désirée, courte et mystérieuse : nous apprends-t-elle à mieux savourer chaque rayon de soleil qui se présente ?
Les lueurs de lumière se font rares mais quand elles sont présentes, on ne peut que délaisser nos appareils et prendre le temps d’admirer à l’œil nu, d’invoquer, de sublimer son champ de vision. Et à nouveau, il neige. Le ciel se couvre. Deux longs changements : Umea et Boden.
Les paysages se contemplent, même à près de 200 km/h. Grands espaces à perte de vue, sapins vêtus de blanc. Tout est neige, pure. Des cabanes au milieu de nulle part. De temps à autres, des chalets avec une lumière légère et devant voiture imposante, et ce, en plein cœur des forêts enneigées.
Des maisons rappelant que nous sommes en période de Noël. Dans la plus grande douceur, la beauté de la nature s’exprime. C’est comme si nous nous retrouvions tous dans un bain de silence et de quiétude. Notre Créateur nous appelle à l’émerveillement de son œuvre décorant l’immensité de son univers.
Nous sommes tous alors saisi d’un élan intérieur, d’une gratitude qui s’extériorise. Les mots manquent, alors nous exprimons ce sentiment s’exprime à travers des prières. Nous aurons beau assembler les lettres et les mots, aucune expression sera assez intense afin de décrire la beauté du moment. Il serait fort maladroit que d’essayer d’exprimer ma communion avec la nature.
Notre pensée perce des mondes de sentiments et d’idées qui nous rappelle le questionnement innocent de notre enfance envers des thématiques qui nous dépassaient à ce moment-là : sur le monde, sa création, son début, sa finitude et l’éternel, questionnements profondément philosophiques.
Néanmoins, ce sentiment de gratitude se mêle à de la culpabilité : comme si notre locomotive causait un grand tort à la nature en la dérangeant. Comme si nous entrions dans l’intimité de cette même nature avec nos poids lourds, machines encombrantes et aux sons tout aussi imposant que polluants. Des éléments venant dénaturer l’homogénéité et la beauté de ses espaces, rivières, fleuves, ruisseaux, sapins de toute taille, forêts, neiges, grand lacs, animaux. L’homme avec ses machines et ses outils vient perturber la sérénité du moment et de l’endroit.
La nature est là pour donner amour, beauté et quiétude. L’expression « nature sauvage » est incorrecte selon le paysage doux et convivial qui m’invite. J’estime qu’on doit l’éviter la nature est chez elle et tous ceux qui la peuplent sont dans son domaine et univers : nous sommes les barbares et sauvages dénaturant le paysage.
Nous passons la journée entière à parcourir la ville. A pied et en bus, nous visitons l’hôtel de glace, les champs de rennes. La neige continue de tomber sans arrêt. Le paysage est d’une beauté sans précédent. Tout est beau, et le froid ne l’empêche pas.
Nous sommes engloutis, comme pris par la beauté de l’endroit, les gens sont très accueillants et d’une hospitalité que l’on pourrait envier, toujours présent, à suggérer leur aide à tout vent.
Nous nous sommes abrités dans le grand hôtel Scandina, au centre même de la ville.
L’attente du bus paraissait longue, je décide donc de prendre un café. Je me présente au premier bar de la rue, à ma surprise personne ne s’y trouve. Enfin, personne, mise à part cette femme qui m’offrira deux cafés, comment ne pas retrouver foi en la bonté humaine face à ce petit geste.
Le ciel restait couvert, ce qui nous priva malencontreusement des aurores boréales (Northern lights). Nous avons eu droit à un léger aperçu, une fraction de seconde, une couleur jaunâtre s’éparpillait timidement dans un ciel qui ne lui en laissait le pouvoir.
Jeudi, retour à la vie un peu moins nature, et un peu plus quotidienne. Stockholm s’ouvre à nous à nouveau. Même mécanisme qu’à l’aller : 14 heures de route, 5h50 heure de départ, l’horloge montre 20h38 à l’arrivée.
Une ambiance un peu moins suédoise mais tout aussi chaleureuse se trouve dans le petit restaurant syrien Midan , dans lequel nous avons diné le soir même, à Odenplan. Il faut dire que les assiettes de grillades nous avaient bien manqué.
Puis nous retrouvons le Marriott, très fatigués mais si épanouis de l’expédition que nous venions de vivre, une expérience unique et exceptionnelle.
Vendredi matin, petit déjeuner et pause à l’hôtel avant de reprendre le train express vers l’aéroport Arlanda. L’écran sur place nous diffusait le match de quart de final Croatie et Brésil avant d’embarquer à nouveau avec Transavia. Nous embarquons mais le match continue. On entend la foule qui s’acclame devant les tirs au but via le téléphone du passager d’en face. Celui-ci nous propose, tout gentiment, de suivre le match avec lui. Il semble qu’il supportait l’équipe croate.
Ambiance réjouissante à bord de l’avion, promotion sur formule sandwich, une offre qui naturellement sautera aux yeux de notre Choulousse. Un sandwich au thon, boisson et des chips lui seront tendu par un membre de l’équipage.
Par ailleurs, les stewards étaient forts aimables : on a pu discuter foot – ils ont promis de me communiquer le score final et pour ce faire un membre demandera au pilote qui s’empressa de questionner la tour de contrôle : c’est un sujet si important que l’ensemble de l’équipage doit s’y prêter. Comme disait le sélectionneur italien Ancelotti : « le foot c’est la chose la plus importante des choses non importantes. »
Mais finalement ce sport universel crée un plaisir, un sentiment d’unité et une certaine sympathie entre les gens que l’on ne retrouve à aucune autre occasion. C’est déjà pas mal, tant que le sujet ne découle sur les enjeux financiers qui risquent de nous gâcher notre ambiance bonne enfant.
Dieu merci pour tout ce qu’Il nous a offert et attribué de bien dans ce monde.
Nous t’invoquons pour ton Amour , ta bénédiction et qu’on soit utile dans ce monde.
Noreddine ZIANI.